jueves, 19 de marzo de 2009

...pero esto es lo que piensan los periodistas franceses

La guerre des clans va-t-elle reprendre ? Medellin s'inquiète. "J'ai peur des balles perdues si les muchachos (jeunes) ressortent leur revolver", raconte Olga Bedoya, 68 ans. Elle vit dans la Comuna 13, un quartier marginal du nord-est de la deuxième ville de Colombie. Dans les années 1990, elle a perdu deux de ses fils, victimes des affrontements entre les successeurs de Pablo Escobar, le "capo" du narcotrafic colombien assassiné en 1993. Medellin était alors la capitale mondiale du crime et de la cocaïne.

C'est aujourd'hui une agglomération dynamique, qui attire investisseurs et touristes, un modèle de gestion urbaine et de lutte contre la criminalité. En 1991, Medellin enregistrait un taux de 320 homicides pour 100 000 habitants, un record absolu. Il était de 33 pour 100 000 en 2008. "Medellin est désormais plus sûre que Washington", assurent les autorités municipales. Pourtant, les indicateurs de violences urbaines sont repartis à la hausse. Entre 2007 et 2008, les assassinats ont augmenté de 35 %. Et les difficultés s'accumulent.

Ici, le parc des sciences Explora et son aquarium récemment inauguré, là une nouvelle école de quartier, une bibliothèque populaire flambant neuve et une ligne de téléphérique pour desservir les déshérités de la ville. Fin mars, Medellin accueillera la 50e Assemblée annuelle de la Banque interaméricaine de développement. Le temps des sicaires et des attentats à la bombe semble loin. "Que Dieu, le président et Sergio Fajardo en soient remerciés", soupire Olga.

Le président, c'est Alvaro Uribe, qui engage, en 2003, des négociations de paix avec les milices paramilitaires d'extrême droite. A Medellin, le chef "para" est un narcotrafiquant notoire, Diego Fernando Murillo, dit "Don Berna". Taciturne et discret, il a su fédérer les bandes de tueurs à la dérive depuis la mort de Pablo Escobar. Don Berna est devenu paramilitaire sur le tard, avec l'idée qu'il bénéficierait d'une amnistie politique. En octobre 2003, il a donné ordre à ses milices de déposer les armes.

Sergio Fajardo vient alors d'être élu maire de Medellin. Outsider politique, sans étiquette partisane, ce mathématicien de formation impose rapidement un nouveau style à la gestion municipale. Priorité est donnée au social et à l'éducation. La nouvelle équipe met en place un ambitieux programme de formation technique, de soutien psychologique et d'insertion professionnelle à l'intention des "paras" démobilisés. La criminalité chute.

"De la peur à l'espoir", disait le slogan de Sergio Fajardo. Son collaborateur, successeur et ami, Alonso Salazar, voudrait passer "de l'espoir à la confiance". Mais, partout en Colombie, des "bandes émergentes au service du crime organisé" sont en train de se reconstituer. "La démobilisation des paramilitaires n'a jamais été qu'une trêve", estime Jesus Balbin, directeur de l'Institut populaire de formation, une association pour le développement local.

Le vrai problème reste celui du narcotrafic. La Colombie continue d'exporter quelque 600 tonnes de cocaïne par an, de quoi approvisionner 80 % du marché mondial. En mai 2008, les grands chefs paramilitaires qui avaient accepté de se démobiliser ont tous été extradés vers les Etats-Unis, Don Berna compris. Le président Uribe est convaincu que les paramilitaires jouaient double jeu et continuaient de trafiquer à grande échelle, tout en parlant de paix.

Sur place, la bagarre pour la relève est engagée. La guerre de succession qui menace d'enflammer les quartiers pauvres se joue entre les héritiers de Don Berna et un certain Don Mario, pour la capture duquel les autorités offrent 3 milliards de pesos (1 million d'euros).

"Nous pouvons mettre les narcotrafiquants en prison ou tenter de les remettre dans le droit chemin, mais nous ne pouvons pas venir à bout du narcotrafic. Notre grand défi est de gouverner Medellin, en sachant que ce pouvoir corrupteur est intact", soupire Alonso Salazar. Journaliste et écrivain avant d'être maire, il connaît les bas-fonds de la ville mieux que personne.

Alonso Salazar se veut optimiste. "Sur les 4 200 paramilitaires qui sont démobilisés dans le département, 180 ont depuis été assassinés, 250 sont en prison. On estime que les récidivistes dans l'ombre sont entre 600 ou 700. Ce qui veut dire que 3 000 paramilitaires sont effectivement démobilisés. C'est déjà énorme", pointe-t-il.

Le maire est aujourd'hui dans le collimateur de Don Berna et de ses alliés politiques, qui multiplient rumeurs et accusations. "La vieille classe politique locale, qui aimerait récupérer le pouvoir, veut faire croire que la ville est devenue ingouvernable et joue la déstabilisation, souligne Jesus Balbin. Et elle sait que fragiliser le maire actuel, c'est fragiliser Sergio Fajardo." Fort de ses succès à Medellin, l'ancien maire a lancé sa candidature pour l'élection présidentielle de 2010.

"La recrudescence de la violence obéit à une dynamique nationale. Il est impensable qu'elle retrouve à Medellin son niveau antérieur, continue M. Balbin. Toutes ces années de calme relatif ont changé les mentalités. Le civisme, la conscience citoyenne, le refus de la violence ont progressé."

Pour le chercheur hollandais Gerard Martin, "Medellin reste un bel exemple de ce que peut faire une municipalité efficace." Mais elle ne peut pas tout faire.

Marie Delcas

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